La monnaie
Idées
- La priorité absolue est de rendre le contrôle de la monnaie aux citoyens et ainsi de redevenir souverains en matière monétaire.
- Les CCDC (Citizen Controlled Digital Currencies) permettent de programmer la monnaie pour ajuster la masse monétaire au niveau d'activité économique, garantissant la stabilité des prix.
- Les mécanismes de crédit garantissent une monnaie solide et limitent fortement les possibilités de spéculation.
Contexte
En abandonnant sa capacité à créer ou détruire sa monnaie nationale, l'Etat a accepté de se vendre à des intérêts privés en étant forcé d'emprunter, avec intérêts, à des structures plus ou moins indépendantes de son pouvoir, et souvent internationales.
Par ailleurs, la création monétaire a été confiée à des banques centrales qui déploient le crédit comme principal mécanisme de création monétaire. Cela conduit à des cycles économiques de croissance longue et de récession violente dont souffrent comment toujours les plus pauvres.
De plus, les principaux acteurs de la création monétaire (banques et banques centrales) sont détachés des besoins réels des agents économiques et travaillent pour leur propre compte. L'Etat comme ses citoyens sont donc rendus dépendants d'intérêts privés, par définition contraires au leur.
Objectifs
Comment la Démocratie Numérique doit-elle gérer sa monnaie ?
- Objectifs
- Transparence: la monnaie est un moyen d'échange, pas de spéculation.
- Stabilité : la gestion monétaire vise à assurer la stabilité monétaire et à limiter l'amplitude des cycles d'expansion et de contraction.
- Moyens
- Souveraineté : l'Etat est le seul maître de la création et de la destruction monétaire.
- La monnaie dans le Code : la masse monétaire et son évolution doivent être programmés dans le Code de la cryptomonnaie nationale, lui-même soumis au vote. Les ajustements peuvent ainsi être réalisés en temps réel.
Mécanismes de gestion de la monnaie
Comme base de départ, et en nous inspirant d'une partie des idées d'Anice Lajnef, on pourrait proposer les mécanismes suivants, qui seront bien évidemment soumis au vote.
Pour rappel, la monnaie de la Démocratie Numérique est une cryptomonnaie sous contrôle citoyen (CCDC - Citizen Controlled Digital Currency).
Gestion de la masse monétaire
La monnaie en circulation doit assurer la stabilité des prix. Pour cela, la masse monétaire doit pouvoir être ajustée à l'activité économique. Là où Anice propose un taux d'inflation fixe, il me semble qu'on devrait pouvoir programmer la monnaie pour simplement suivre l'activité économique en quasi temps réel.
En effet, l'Etat effectue des prélèvements en continu, puisqu'ils sont intégrés autant que possible à chaque transaction ; il verse par ailleurs le revenu universel de façon régulière (cela pourrait être quotidien !). Il dispose ainsi de mécanismes d'ajustement fins pour retirer de la monnaie du système (en la détruisant après impôt) ou pour en ré-injecter (création monétaire à travers l'augmentation du revenu universel).
La formule qui reste ici à trouver, c'est celle qui permet l'ajustement ; mais la fréquence possible de cet ajustement peut être tellement rapprochée que la formule n'a même pas besoin d'être très juste ; l'important étant qu'elle permette une stabilité dans le temps.
Incitation à investir
Dans une économie où la monnaie est stable par définition, l'inflation ne fait plus perdre de valeur à l'argent qui dort. Or, cet argent immobile ralentit l'économie. Il faut donc trouver des mécanismes d'incitation pour inciter les thésauriseurs à consommer ou investir.
Pour cela, l'idée est de prélever une taxe reproduisant les effets de l'inflation sur les capitaux dormants ; elle peut être très faible (par exemple 1% par an, prélevé chaque semaine ou mois) et elle peut cibler les comptes à partir d'un certain montant (10 000, 100 000 ?) pour protéger l'épargne de sécurité. Ces taux et montants seront à définir par le vote.
Pour éviter cette taxe, les individus ou entreprises visés seront donc incités à consommer ou investir ; dans tous les cas à fournir leur capital à l'économie réelle.
Il ne s'agit pas de monnaie fondante dans le sens où la monnaie ne disparaît pas ; elle est simplement prélevée par l'Etat et ré-injectée dans le système économique. Et pour rappel, une portion significative des dépenses de l'Etat est consacrée au revenu universel ; elle profite donc directement à l'ensemble de la population.
Le crédit
Emprunter c'est acheter du temps ; il est normal de payer pour ce service. Le crédit stimule l'économie et permet aux individus comme aux entreprises de réaliser des projets, d'innover, d'investir... Le crédit est indispensable à l'économie de l'abondance.
Cependant, lorsque le crédit est sans contrôle et ne bénéficie qu'à une minorité d'intérêts privés, il produit les dérives que nous avons citées dans la première partie.
Il faut donc imaginer une façon durable d'envisager le crédit, qui ne soit pas usurière pour les emprunteurs mais permette de rémunérer ceux qui prennent le risque d'apporter les capitaux, tout en empêchant une transformation de la monnaie en "argent-dette". Voici une proposition.
Les différentes façons d'emprunter :
- De gré à gré : un contrat de prêt sur la blockchain entre deux entités (particuliers, entreprises, associations...).
- A travers un organisme centralisateur : il organise le marché entre prêteurs et emprunteurs et fait se rencontrer les intérêts des uns et des autres (durée des prêts, etc...). Dans ce cas par exemple, un prêteur peut apporter son capital à l'organisme financier pour être libéré du prélèvement sur le capital dormant, en précisant sur quelle durée il souhaite prêter son argent. Lorsque cet argent trouvera un emprunteur, il sera en plus rémunéré (cette rémunération sera imposée comme des dividendes).
- En s'appuyant sur un collatéral matériel ou immatériel. C'est la seule façon de "créer" de la monnaie, dans la mesure où celle-ci reste adossée à un objet de valeur, par exemple un bien immobilier, un brevet ou une entreprise. Le bien est alors hypothéqué au profit du prêteur. Ce prêt peut être contracté de gré à gré, ou bien en passant par une tierce partie.
De cette façon, l'argent prêté est toujours soit l'argent de quelqu'un, soit garanti par un bien matériel ou immatériel de valeur. L'effet temporairement inflationniste du prêt adossé à un collatéral sera ajusté en quasi temps réel par les mécanismes de régulation décrits plus haut.
L'organisme centralisateur
L'organisme centralisateur des services financiers est une institution importante de la Démocratie Numérique en étant un tiers de confiance pour toutes les financières. C'est un organisme à but non lucratif dont le but est de faciliter la fourniture de services financiers et de créer un marché compétitif ; ce ne peut pas être une banque privée.
Il permettra à ceux qui disposent de capital financier de le mettre à disposition de façon sécurisée (l'organisme peut proposer des services d'assurance) aux emprunteurs, et échappant à la taxe sur le capital dormant et en étant rémunérés pour leur dépôt.
A partir d'un certain volume et d'une certaine maturité du système, on pourrait imaginer ce système évoluer vers des réserves fractionnaires pour développer l'usage du crédit et stimuler l'activité économique ; mais on connaît les risques de cette évolution et elle devra être soumise au vote.
Comme l'objectif est toujours d'inscrire toutes les conditions de ces crédits et assurances dans un smart contract sur la blockchain, une des fonctions importantes de l'organisme centralisateur est de définir les standards de ces contrats. L'automatisation des opérations permettra d'éliminer la bureaucratie et la corruption tout en fluidifiant l'accès au crédit.
Le financement de l'Etat
L'Etat peut-il emprunter sur le marché proposé par l'organisme centralisateur ? En théorie oui, mais on se rappelle que les comptes de l'Etat doivent être structurellement équilibrés et approuvés par le vote.
De plus, l'importance des besoins de l'Etat pourrait déséquilibrer le marché. On pourrait donc imaginer un système où l'Etat lance directement une souscription auprès de ses citoyens pour se financer lorsque c'est nécessaire.
Il est dans tous les cas préférables que l'Etat se finance au niveau national, auprès de sa population et de ses entreprises.
Par ailleurs, l'Etat étant le maître de la création monétaire, il peut tout à fait créer la monnaie dont il a besoin ; c'est alors à travers le mécanisme normal de destruction monétaire (sur les prélèvements) qu'il contrôlera l'effet inflationniste.
Questions et limites
Ces idées semblent pouvoir assurer un fonctionnement sain de la monnaie dans un système comme la Démocratie Numérique ; mais votre serviteur n'est pas un expert des politiques monétaires.
Permettent-elles suffisamment de flexibilité pour une économie de l'abondance ? Quels sont les mécanismes précis de l'ajustement de la masse monétaire ? L'organisme centralisateur doit-il être public (un service du ministère de l'économie) ? Comment assurer un bon niveau de compétence des citoyens lorsqu'ils voteront des décisions de politique monétaire ?
Autant de questions qui devront être approfondies lors du démarrage de l'économie !